Retour sur le cycle de stages sur les fondamentaux
Un cycle de trois stages sur les fondamentaux, animé par Jean-François Roustan de la Cie Ccédille, a été organisé en collaboration avec le CD 31. C’est toujours un pari de monter un cursus c’est pourquoi Théramène a voulu savoir comment l’animateur et quelques uns des stagiaires ont vécu ce cursus.
Quelques photos prises durant le premier stage du cycle
Le premier stage a été consacré à l’apprentissage de l’écoute et de l’acceptation de l’autre, à l’approche de la présence scénique par le personnage et à l’expérimentation de la dynamique de jeu et de la notion de tension. Le deuxième stage s’est tourné vers l’expérimentation de la rythmique du jeu, l’approche de la notion de récit et la construction à partir des éléments rythmiques. Le dernier stage a permis l’exploration de différentes formes narratives et le développement de l’autonomie de jeu en en mesurant l’impact sur la création collective.
Jean-François Roustan, l’animateur du stage, est un metteur en scène professionnel. Il appartient à la compagnie Ccédille créée en 1994. La compagnie se consacre à la recherche et à la création théâtrale. Elle propose des stages aux amateurs et aux professionnels et a une importante activité de théâtre en entreprise.
La proposition de stage de Jean-François Roustan a été faite sur la base de sa spécialisation en improvisation théâtrale. Il avait l’envie de faire travailler les stagiaires sur l’outil fondamental, dont ils disposent, leur corps. L’objectif était qu’ils acquièrent conscience et maîtrise de leur corps pour l’ancrer dans le jeu sans s’appuyer sur une base de texte. Cette prise de conscience est associée à un travail sur l’écoute à travers des improvisations : écoute de soi, écoute de ses partenaires et de la dynamique de la scène qui se joue. Les improvisations, non systématiquement narratives renforcent la présence, la spontanéité et l’acceptation-conscience de son corps pour mieux servir les objectifs des personnages. Le texte, lorsqu’il est introduit est alors porté par la présence du comédien. J.F. Roustan vise à travers cette méthode à faire en sorte que les comédiens soient en capacité de s’abstraire de leur quotidien dans leur troupe où domine le besoin de produire, souvent au détriment d’une dynamique de recherche et de les aider, notamment, à se sortir des accidents de scène. Il a conscience que la mise en avant de l’improvisation, sans appui sur une base de texte, a pu avoir un aspect déstabilisant pour les stagiaires, invités à rompre avec leurs habitudes, leurs repères et à prendre des risques. En outre, dans la mesure où les stagiaires ne se connaissaient pas, il a fallu un temps pour que le groupe se constitue. D’autant que les attentes des uns et des autres étaient hétérogènes. Certains venaient chercher des clés pour construire leur pratique pédagogique, constituer un registre de techniques exportables, d’autres cherchaient à développer leur pratique scénique. Ces positions divergentes ont forcément un impact sur le groupe. A un moment ou à un autre du stage, cela a pu déstabiliser certains stagiaires. Mais en fin de compte, quel que soit leur niveau, ils ont pu trouver dans ce cycle des réponses en acceptant de se placer dans une dynamique de recherche, de mettre de côté leurs a aprioris et de s’intégrer à une approche différente de celle dont ils ont l’habitude.
Alexandra Perrot a une longue expérience de la pratique théâtrale qu’elle exerce depuis le collège. Après des auditions, elle a joué aux 3T pendant une saison et demie puis est passée de l’autre côté puisqu’elle donne maintenant des cours pour enfants. En participant à ce stage, elle souhaitait bénéficier de l’ouverture que lui apporterait l’échange avec d’autres en matière de pratique théâtrale. Elle a été attirée par la promesse d’un travail sur le corps et l’apport de techniques différentes, bien qu’elle se soit interrogée sur le terme « fondamentaux », qui l’a dérangé et la dérange encore. Pour elle il n’y a pas de bases immuables, mais plutôt différentes manières de faire les choses. Elle a aussi été étonnée de l’absence de travail sur des textes, car, pour elle, le théâtre c’est aussi le texte. Mais la progression adoptée au cours des trois week-ends, de la caractérisation du personnage qui fait de lui un être entier, aux exercices en groupe sur le rythme et à la synthèse finale, lui a donné le sentiment que le stage lui aura apporté une autre manière de travailler le personnage. Les exercices sur le corps lui ont bien montré qu’ils pouvaient en changer l’engagement et que le personnage n’était pas qu’un corps mais aussi une voix. Tout le travail d’impro avec les contraintes particulières, en particulier celle de ne jamais dire non, était relativement nouveau pour tous et il fallait surmonter les réticences. De même pour les exercices de diction, d’équilibre de plateau… Un point noir, la salle du 3ème stage qui a fait disparaître l’intimité qui avait régné jusque là. Mais, AP a fait beaucoup de stages et c’est la première fois qu’elle ne ressort pas « ‘rincée » de l’expérience, mais au contraire, sereine, « fatiguée, mais sereine » tant J.F. Roustan est calme et à l’écoute.
Régine Bertholon a été attirée par le programme du stage, car elle en attendait un apport en termes de techniques de jeu très précises, des « trucs » de base pour améliorer son comportement sur scène. Par exemple, elle pensait trouver plus d’exercices du genre de ceux qui ont été proposés pour se préparer à entrer en scène, à se positionner face au public etc. JFR a expliqué qu’il n’était pas là pour donner des « trucs » mais pour convaincre chacun de trouver en lui ce qu’il fallait qu’il fasse, qu’il n’y a pas de bonnes solutions toutes faites, que toute idée est bonne. Elle ne pensait pas, au départ, que la part de l’improvisation serait aussi importante sinon elle aurait peut-être hésité à y participer, tant elle ressent des blocages, d’ailleurs plus évidents à l’oral que lorsque le corps est mis en jeu. Mais une fois les règles particulières de l’impro acceptées, elle a eu la sensation d’avoir progressé. C’est d’ailleurs ce que l’animateur a confirmé au groupe en lui exprimant qu’il avait vu du changement au cours du stage, que des choses intéressantes étaient sorties. Au bout du compte, Régine Bertholon est contente du stage. D’autant que l’attitude de l’animateur, qui ne juge jamais, tire le meilleur de ce que font les stagiaires, est bienveillante et agréable.
Claudine Loget, passionnée de théâtre, a déjà suivi plusieurs stages Elle attendait de celui-ci de découvrir une autre manière de travailler. Elle a apprécié de pouvoir se replonger dans l’improvisation, ce qu’elle n’avait pas fait depuis un certain temps. Lors du premier stage de la série, elle a eu le sentiment que le travail sur un texte pourrait lui manquer. Mais, à l’usage, il s’est avéré que non, d’autant qu’au cours du troisième stage, J.F. Roustan a demandé aux stagiaires de prévoir un texte. Celui-ci a été intégré a minima. Lu, il a été interrompu sans arrêt pour y introduire des éléments mettant le corps en jeu. Au cours du stage, elle a aussi beaucoup aimé l’introduction d’images et de photos pour créer un cadre, organiser une mini chorégraphie.
L’ambiance générale du stage lui a paru très sympathique. La personnalité de J.F. Roustan, particulièrement zen et sécurisante, a rendu cette expérience très positive. Il ne porte aucun jugement sur le travail des stagiaires, mais il sait les aider à repenser ce qui est à repenser.
Propos recueillis par Marie-Noële Darmois