Pineda de Mar : Avant, Pendant et… Après
Dans le cadre du partenariat avec la Catalogne, c’est la Compagnie des Escholiers qui a participé cette année au Festival de Pineda de Mar avec Sganarelle ou le cocu imaginaire
Philippe Gagneret raconte :
Lorsque nous apprenons que notre spectacle « Sganarelle » a été sélectionné pour la Mostra Nacional de Teatre Amateur en Catalogne, à Pineda de Mar exactement, nous réfléchissons aussitôt à la façon dont nous devons nous adapter pour jouer devant un public qui ne parle pas Français. Nous optons pour le sur-titrage en pariant sur le fait que les œuvres de Molière sont traduites dans toutes les langues. C’est Josep Porta qui nous trouve la traduction en catalan. Nous travaillons sur le dispositif de sur-titrage et organisons des répétitions pour former le régisseur qui devra faire passer la traduction. Le festival se déroulant sur le weekend du 1er mai, nous nous organisons pour être prêts mi-avril (pour prévoir un temps d’ajustement pour les difficultés supplémentaires qui pourraient surgir.)
Début avril, nous pensons êtres prêts (encore deux filages prévus), mais toujours pas de nouvelles des organisateurs, malgré nos mails répétés. Enfin, le 13 avril, ils nous contactent pour nous demander toutes les infos sur le spectacle mais nous ne savons toujours pas quand nous jouons exactement et dans quelle salle. Attente angoissante ! Finalement tout s’organise entre le 13 avril et la semaine précédant le festival. On apprend que nous sommes programmés le dimanche matin à 9h30. Créneau pas très prometteur ; nous sommes perplexes.
Arrivés sur place nous découvrons le festival, toujours aussi impressionnant. Plus de 35 spectacles programmés sur 3 jours. 5 salles qui tournent en permanence plus des spectacles dans les rues. Le dimanche matin, nous sommes trois spectacles à être programmés à 9h30. 9h30 horaire donc tout à fait normal, et on nous rassure tout de suite : « Ici, tous les spectacles sont complets, on refuse en général du monde, même à 9h30 du matin. » Et en effet, devant chaque salle on voit des files de spectateurs de plusieurs dizaines, voire centaines de mètres. Le festival tourne à plein régime de 9h00 du matin à 2 ou 3h00 du matin
L’accueil des organisateurs est chaleureux. Josefina qui parle un Français remarquable est à notre disposition pour nous aider pendant tout le festival. Nous sommes logés et nourris gratuitement pour la durée du festival dans des hôtels de très bon standing. Un badge suffit pour aller au spectacle et manger, c’est plus « cool » dit Armelle que chez nous.
Le théâtre amateur catalan présente bien sûr beaucoup de similitude avec ce que nous connaissons en France, mais des différences importantes sont tout de même sensibles. S’il existe comme en France des différences de niveau entre les troupes, le niveau des spectacles est plutôt bon, et les bons spectacles sont vraiment très bons. De plus le théâtre amateur catalan est plus diversifié qu’en France. Les amateurs suivent plus ici les dispositifs créatifs des professionnels en variant les lieux de représentation, le rapport scène/salle. Ils s’attaquent à des genres différents : comédie musicale, adaptation de films, déambulation, spectacles jeune public. Si le théâtre de divertissement domine, on voit aussi des spectacles qui n’hésitent pas à s’attaquer à des thèmes difficiles. Nous avons notamment vu le spectacle « Off » se jouer dans une cage d’escalier. Il traitait des hôpitaux psychiatriques. Spectacle très intense où les acteurs n’hésitent pas à solliciter les spectateurs.
Dimanche matin, on se lève à 6h00 (dur, dur !) On a rendez-vous à la salle à 7h00 pour s’installer. La salle de spectacle est très belle, très grande et bien équipée techniquement. On y installe la scénographie de notre spectacle au grand complet, soit la façade d’un immeuble de deux étages. Les techniciens de la salle sont très efficaces et très serviables. Tout est prêt dans les temps sans bousculade.
Finalement nous jouons devant 40 à 50 spectateurs (pas si mal, même si la salle est loin d’être pleine !) Assez rapidement, on sent depuis la scène que le public réagit. Il rit. Il semble bien comprendre ce qui se passe. Le dispositif de sur-titrage a donc l’air de bien fonctionner (même si on a dû opter pour une projection sur le côté de la scène plutôt que dans l’axe, ce qui est moins confortable pour le public.)
Après le spectacle, les retours du public très chaleureux sont plutôt bons. En fait, beaucoup de ceux présents dans la salle parlaient Français (ça aide !) On a aussi des retours de personnes ne parlant pas Français. Ils ont aimé et ont bien suivi la pièce. On ne saura jamais démêler les paroles de politesse des vrais compliments (c’est bien là la loi du théâtre) mais il nous semble que le contrat est rempli.
On doit maintenant tout plier Il est déjà temps de partir. On réalise qu’on vient de passer un weekend de théâtre inoubliable.
Philippe Gagneret
texte repris du n° 64 de Théramène